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Un temps de tocard

Initialement publié dans Quasar CPC numéro 21, Histoires Perpendiculaires, par OffseT.

Coupable ! Tel un chien à la fidélité imbécile, ce matin, il est revenu, toujours aussi lumineux, toujours aussi lisse. Rares sont les rebelles qui parviennent à animer ce champ immaculé qui s'impose au fil des jours. Souvent, baissant les yeux, on se contente alors du jeu des ombres, un régal pour l'imaginaire, mais ce qui amuserait un enfant pendant des heures nous lassera rapidement.

Certes, la nuite tombée, il parvient à nous charmer. Nous invitant à une grande soirée de gala pleine de paillettes, il nous fera oublier un temps combien il est triste et insipide. Nous relèverons la tête. Mais la concurrence de la ville, toute aussi clinquante et vaillante, est sans concession. Elle l'affadira et aura tôt fait de nous distraire et de nous détourner de lui. Enfin, l'exaltation sera de courte durée lorsque, au jour venu, tout aura disparu. Mais lui, assidu, sera toujours là, sans personne pour le remettre en question.

En de rares occasions, la résistance parvient à s'organiser et, l'espace de quelques heures, une armée de moutons parvient à dicter sa loi. En ces instants rares et précieux, une débauche de merveilles éthérées prend vie. Celui qui s'affiche d'ordinaire si morne passe alors au second plan et devient un cadre qui nous offre une myriade de formes exotiques. Changeant et s'entremêlant sans cesse, elles satisfont tout à la fois nos yeux et notre esprit curieux qui travaille à donner un sens à toutes ces aspérités.

Malheureusement, notre regard pétillant voit parfois ce spectacle si rare se transformer en cauchemar. Lorsque les ovins cotoneux parviennent à leur tour à prendre l'ascendant, la lumière fait place à une pénombre dont l'homogénéïté n'a rien à lui envier. De plus, ils sont oppresants, souvent vindicatifs, et c'est la douche froide assurée alors que nous regrettons lâchement notre chien fidèle pourtant si apathique.

Néanmoins, à la faveur de chaudes journées d'été, nos révoltés font parfois preuve de créativité. Ils nous invitent alors à des spectacles éblouissants dignes des plus grands concerts de Jean-Michel Jarre. Mais ces fééries fugaces annoncent bien souvent le retour prochain de notre fidèle néant, toujours aussi décevant, et laisse un goût d'inachevé.

Voilà que le petit blond à lunettes s'écrie : “Quel temps splendide aujourd'hui !”… Mais parlons-nous vraiment de météo ?

 
hp/un_temps_de_tocard.txt · Dernière modification: 2017/10/09 10:03 (édition externe)